Place Ruth-FAYON
Cette dénomination honore la mémoire de Madame Ruth Fayon (1928-2010), survivante des camps de concentration et figure majeure de la lutte contre l’oubli de la Shoah.
Née Pinczowsky le 25 novembre 1928 à Karlsbad en Tchécoslovaquie et décédée le 31 octobre 2010 à Genève, Ruth Fayon est encore enfant quand la Seconde Guerre mondiale éclate. Issue d’une famille juive, elle survit à la déportation, au travail forcé et aux camps d’extermination d’Auschwitz et de Bergen-Belsen. Installée à Genève depuis 1959, elle intervient pendant plus de trente ans dans les établissements scolaires de la région pour transmettre son témoignage.
Ruth Pinczowsky grandit dans une famille juive bien intégrée dans la ville d’eaux multiculturelle de Karlsbad, en Tchécoslovaquie. Ses parents, Rondla Kristal et Josef Pinczowsky, tiennent un restaurant kasher. Elle n’a que dix ans lorsque l’Allemagne nazie
annexe le territoire des Sudètes – dont fait partie Karlsbad – et elle fuit alors avec sa famille à Prague. Lorsque l’armée allemande envahit la Tchécoslovaquie en mars 1939, elle doit quitter l’école publique et, à partir de septembre 1941, porter une étoile jaune sur ses habits.
En août 1942, Ruth Pinczowsky est déportée dans le ghetto de Theresienstadt avec son père, sa mère et sa petite soeur. En décembre 1943, elle est transférée avec toute sa famille dans des wagons à bestiaux jusqu’au camp de concentration et d’extermination d’Auschwitz, en Pologne. Six mois plus tard, elle échappe aux chambres à gaz en étant sélectionnée avec sa
mère et sa soeur pour aller travailler dans les décombres de la ville de Hambourg, sous les bombardements. Devant l’avancée des troupes alliées, Ruth Pinczowsky est évacuée au printemps 1945 avec les autres travailleuses forcées et menée au camp de Bergen-Belsen. Quand les troupes britanniques libèrent ce camp le 15 avril 1945, elle ne pèse plus qu’une trentaine de kilos et elle est malade du typhus.
Après la guerre, Ruth Pinczowsky retourne en Tchécoslovaquie, où elle apprend la mort de son père dans le camp de Buchenwald. Elle trouve un emploi comme aide-pharmacienne, mais ses moyens limités – elle n’a pas pu récupérer les biens de sa famille confisqués par les SS au début de la guerre – l’empêchent de faire des études de pharmacie. L’arrivée au pouvoir des
communistes la pousse à quitter le pays et, en 1949, elle part rejoindre sa grande soeur en Israël. Après deux ans de service militaire, elle épouse Salomon Fayon en 1956 et habite avec lui pendant trois ans à Istanbul.
En 1959, elle s’installe définitivement à Genève, son mari souhaitant développer son commerce en Europe. Investie dans la Communauté juive de Genève, elle est membre de son comité et responsable du service social pendant plusieurs années. Elle est également membre du comité suisse de la Women’s International Zionist Organization (WIZO). Au milieu des années 1970,
après plus de trente ans de silence, Ruth Fayon raconte pour la première fois son parcours dans les camps de la mort nazis devant la classe de son fils Sam. A partir de ce moment-là et jusqu’à sa mort en 2010, elle témoigne à de nombreuses reprises devant les élèves des écoles et collèges de la région genevoise.
Pour son combat contre le négationnisme et sa détermination à transmettre la mémoire de la Shoah aux nouvelles générations, elle reçoit en 2006 la médaille « Genève reconnaissante », ainsi que la Légion d’honneur française.
En 2009, elle publie ses souvenirs sous la forme d’un livre, avec le concours du journaliste Patrick Vallélian. «Auschwitz en héritage». De Karlsbad à Auschwitz, itinéraire d’une jeune fille dans l’enfer de la Shoah.
Elle s’éteint le 31 octobre 2010 à Genève.
- Interview RTS de Madame Ruth Fayon, survivante d'Auschwitz. Avec beaucoup de générosité et de sensibilité, elle s'entretient avec Darius Rochebin sur son expérience et sur l'importance du devoir du souvenir.