Avenue PETIT-SENN
Le poète genevois Jean-Antoine Petit (1792-1870), dit Petit-Senn - Senn étant le nom de sa mère - est né deux ans avant la Révolution genevoise. Après avoir achevé ses études secondaires et obtenu une licence de lettres à l'Académie, Petit-Senn est envoyé à Lyon où son père veut le faire entrer dans un commerce. Il y reste trois ans, mais au lieu des chiffres, il préfère aligner des vers et un jour, il envoie ses textes à un almanach de Paris qui les accepte d'emblée. Il revient à Genève l'année de la Restauration (1813), plus poète que commerçant. Dès lors, il deviendra célèbre dans la cité et exercera une influence profonde sur les littérateurs genevois.
Appartenant au cercle littéraire du "Caveau", Petit-Senn fonde en 1832 une feuille malicieuse et ironique, "Le Fantasque" qui paraît deux fois par mois pendant cinq ans. On lui doit d'autre part des recueils comme Bluettes et Boutades (1865), Complainte du créchier dégommé (1865), la Griffonade (1865), Paysage poétiques (1831) ou encore un poème en quatre chant La Miliciade (1828), où il ridiculise l'enthousiasme des soldats faisant leurs exercices en grande pompe à Plainpalais. Il écrit en outre dans l'Almanach de Genève, puis, dès sa fondation en 1826, dans le Journal de Genève.
Le poète romantique et plein de fantaisie se fixe à Chêne dans la seconde moitié de sa vie. Dès les années 1840, sa maison devient un lieu de rendez-vous pour de nombreuses personnalités littéraires genevoises et étrangères. Petit-Senn y reçoit aussi bien des hommes connus comme Edgar Quinet ou Théophile Gautier, qui des jeunes poètes qu'il encourage volontiers. Tous les grands écrivains romantiques connurent les textes de Jean-Antoine Petit-Senn et beaucoup eurent pour lui la plus vive sympathie: Château-briand disait de lui: "C'est un auteur qui sait rire avec grâce", ou encore Victor Hugo qui lui rendit plusieurs fois hommage.
- Il était, comme il nous l’apprend lui-même, un enfant très turbulent, et il avait la manie de rayonner. Il se servait d’un morceau de craie rouge pour barbouiller les portes, les murs, les contrevents et toutes les surfaces propres à recevoir ses dessins. Il dessinait, paraît-il, des caricatures plus que grotesques ; un jour un de ses oncles, indigné de voir ses illustrations sur le mur de la maison, lui enleva sa craie des mains et la lança « dans un carreau de cardons hérissé de piquants féroces. » Le soir, quand Petit Senn fut seul dans le jardin, il entra dans le carreau, s’élançant, dit-il, « comme Winkelried au milieu des pointes aiguës. » Il se mit les mains et les pieds en sang, reconquit sa craie, et pour se venger, il prit l’échelle du jardinier, la dressa contre la maison, monta à la hauteur du premier étage, et sur une magnifique pierre de roche, il
traça cette inscription en gros caractères rouges : « J’ai retrouvé ma craie ! »
Anecdote tirée de : Promenades historiques dans les rues de Genève, de Arthur Massé.
Contribution 25.7.2016